Publié le 26 Septembre 2023
Je vais devoir quitter cette terre où je pris racine depuis tant d'années.
Terre d'asile, ce bassin méditerranéen me donna la force de prospérer pour offrir l'ombre nécessaire aux randonneurs découvrant la garrigue dans ce massif de l'Estérel.
Il me fallut tant d'énergie pour que mes racines trouvent, entre les roches, la nourriture indispensable au développement de mon parasol végétal !!
Puis dans les années 80 vinrent les pelleteuses urbanisant ainsi la garrigue que j'aimais tant, mais je résistai.
Des routes, des lieux de vie et un golf vinrent m'encercler et je m'adaptai.
Je devins le témoin de nombreux départs pour ce trou n° 6 que l'on attribua presqu'à mes pieds. Je vis tant de joueurs, au rythme de leurs passages, parfaire leurs swings afin d'atteindre le but convoité !
Je devins également le refuge d'oiseaux qui, nichés dans la cime de mes branchages, venaient se retrouver en toute sécurité... pies dont le jacassement venait parfois rompre le silence des heures et ce couple indéfectible de tourterelles à l'affût de quelques miettes sur les jardins environnants.
Lors de certains étés, mon parasol végétal permit d'offrir aux vacanciers riverains l'ombre tant recherchée et je fus, dois-je l'avouer, le témoin de certains petits secrets échangés au téléphone sur les trois marches situées à mes pieds.
... et puis l'étêtage de mes nombreux rameaux m'affaibliront...
Brutalement les forces m'abandonnèrent.
Mes épines, mes branchages tombent à terre jonchant le sol de ce qui fut ma force.
Cet automne les dents d'une tronçonneuse viendront couper tant d'années de vie laissant un grand vide sur ce terrain que j'avais appris à aimer.
Planches débitées dans un atelier de menuiserie pour la confection de lattes de terrasses pour les villas voisines... mon destin sera peut-être celui-là ?
Monique Souviraà-Labastie